One shot, numéro 16

Au sommaire de ce one shot numéro 16 : de la data, du jeu vidéo, sept messies pour le prix d’un, une bd totalement hors norme, une bd qui fait réfléchir et l’amour vu comme un jeu d’échec.

Datamania, les jeux vidéos et nos enfants, du one shot pédagogique.

Je mets en parallèle ces deux bandes dessinées car elles ont des caractéristiques communes. Elles toutes les deux écrites par des professionnels de terrain qui essaient de vulgariser auprès des publics ces deux sujets. Pour Datamania, il s’agit du vol de nos données par les GAFAM et une sensibilisation au logiciel libre. En ce qui concerne les jeux vidéos et nos enfants, c’est une espèce de questions réponses que se posent les parents quant au monde du jeu vidéo.

Il s’agit de deux sujets que je maîtrise parfaitement, je ne suis pas le cœur de cible. Toutefois, je peux poser un œil critique dessus. Pour moi, Datamania rencontre le même problème que tous ceux qui tentent de vulgariser le logiciel libre qui est très largement évoqué dans la bande dessinée. Trop compliqué. La protection des données, le logiciel libre, c’est extrêmement complexe, tellement complexe qu’il faut séparer les deux sujets. L’auteur fait de plus le choix d’un voyage dans l’espace afin de présenter son univers. C’est raté, cela brouille encore davantage les pistes. Moralité, beaucoup de jargon très technique, le niveau reste encore trop élevé. Il sera apprécié par ceux qui savent, malheureusement, une fois de plus. Je ne jette pas la pierre, j’ai renoncé à faire de la vulgarisation autour du libre. Trop compliqué.

A contrario, les jeux vidéos et nos enfants est un modèle du genre. Graphiquement déjà, j’ai beaucoup apprécié. Le choix de faire tout en vert ou presque est osé, mais le dessin est vraiment très bon. L’album se découpe en trois parties : le temps, l’argent, la violence. Le positionnement de l’homme est intéressant, concret. Il fait souvent le parallèle entre le monde adulte et celui des enfants. Par exemple, expliquer aux enfants que le smartphone, c’est mal, mais ne pas pouvoir s’en passer. Ou encore, si on accepte qu’un enfant fasse du judo avec passion, pourquoi Fortnite ce serait moins noble ? Argumenté, documenté, ce one shot est une référence que vous pouvez offrir à des parents inquiets.

Seven Sons

Sevens Sons est une uchronie puisque la bande dessinée se déroule dans les années 90, mais pas nos années 90. Dans les années 70, un homme fait une prophétie. Sept enfants vont naître au quatre coins du monde, parfaitement identiques et l’un d’eux va devenir le messie à l’âge de 21 ans. Nous arrivons ainsi aux 21 ans des jeunes, ou en tout cas des jeunes qui restent. En effet, des islamistes ont tué quatre d’entre eux, il en reste trois.

On comprend qu’il n’y a pas de magie, mais une machine parfaitement huilée. Si en effet les jeunes se ressemblent tous, pour le reste, on retrouve les mêmes mécaniques. Faux paralysé qui se lève, trucage pour marcher sur l’eau. Forcément, dans les jeunes restant, c’est compliqué. L’un d’eux se voit comme le messie, un autre a réellement la foi et prie pour le salut des hommes, le dernier fait la fête. Il entraîne son frère bien trop pieux à son goût dans une nuit de débauche où ils vont se faire attaquer. Avant de mourir, le frère « festif » dit à son frère de mener l’enquête avec une clé de consigne et un nom.

Et si tout ceci n’était qu’une vaste supercherie ? Un très bon comics, même s’il reste particulièrement prévisible, que les ficelles sont d’énormes cordes, ça marche !

Zoc coup de cœur de ce one shot 16 pour les jeunes

Zoc est une bande dessinée pour le moins atypique, même si en fin de compte, elle reprend la thématique classique de la place dans la société. La particularité de Zoc c’est qu’il s’agit d’une bande dessinée fantastique dans laquelle le fantastique est normal. Je trouve d’ailleurs que la banalité est parfaitement maîtrisée, ce qui surprend le lecteur, ne surprend pas les protagonistes. Zoc est donc une jeune fille qui a le pouvoir pour le moins singulier de traîner l’eau avec ses cheveux. Sur le papier, un pouvoir qui ne sert à rien, mais qui pourtant lui pose des problèmes. S’il pleut et qu’elle ne cache pas ses cheveux, c’est une rivière qui se forme derrière elle avec les conséquences qu’on imagine pour le village.

Elle va toutefois réussir à trouver un travail. Il s’agit de déplacer un étang d’un point à l’autre. Durant son voyage, elle va faire la rencontre de Kael, un garçon qui prend feu quand il sent la tristesse des gens.

Zoc fait partie de la catégorie de bandes dessinées que j’apprécie car on ne sait pas où l’on va. Avec ce postulat de ce monde étrange, où les codes ne sont pas les mêmes que ceux auxquels on peut s’attendre, Jade Khoo nous propose un récit original. Original dans la forme, puisque comme précisé plus haut dans le fond, l’idée sous-jacente c’est sa place dans le monde. Une première bd particulièrement réussie, bourrée d’humour et d’imagination, on pensera à Miyazaki. Pas étonnant d’ailleurs parce que Jade Khoo avant d’arriver à la bd a travaillé dans l’animation.

Du bout des doigts

Paul est un peintre, l’archétype de l’artiste maudit. Il a une relation avec la femme délaissée d’un industriel. Il passe son temps avec ses amis artistes à refaire le monde. C’est quelqu’un de malheureux, comme tout artiste maudit qui se respecte. Un jour, il va se faire couper les cheveux, et rencontre Mathilde. Aussi étrange que cela puisse paraître, cette coupe de cheveux le rend heureux. Et c’est évident en fait, car Mathilde a le pouvoir de rendre heureux les gens.

C’est assez finement joué de la part de Cyril Bonin. Quand on pourrait se dire que n’importe qui serait heureux d’être heureux, ce n’est pas le cas de Paul. En effet, ce dernier, artiste maudit, y voit une manipulation de Mathilde. Son art ne lui appartient plus, car son art, il le réalise dans un état d’esprit malheureux.

Très jolie bande dessinée qui fait réfléchir sur l’influence que les gens peuvent avoir sur nous. L’idée de l’influence positive est finement menée puisque d’habitude, c’est la mauvaise influence.

Échecs, coup de cœur de ce one shot 16 pour les moins jeunes

Il s’agit d’une bande dessinée que j’ai failli fermer dans les premières pages parce que je n’ai pas compris. On voit défiler toute une galerie de personnages en situation d’échec. On se demande si c’est une série d’histoires courte sur les râteaux, les déceptions amoureuses puis on finit par comprendre que tout est lié. L’histoire démarre réellement dans une maison de retraite, Samir un bénévole, essaie de faire « bouger » une vieille dame. Aigrie, provocante, elle refuse bien sûr toute approche. Et c’est finalement par les échecs que les deux personnages vont entrer en relation.

La galerie de personnages est ainsi présentée sous forme de pièces du jeu. Le roi est un acteur télé à succès qui se sent terriblement seul. La reine dirige la maison de retraite, elle doit signer les papiers du divorce. On retrouvera aussi un lycéen à qui tout réussit qui s’intéresse à une fille un peu banale. Ou encore ce couple séparé par des milliers de kilomètres.

Au fur et à mesure de la lecture, on réalise que les personnages ont tous un lien, les uns avec les autres, comme dans une partie d’échecs. Magnifique one shot, j’ai versé ma larme à la fin, un coup de maître si je puis dire.

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