Comme on a pu le voir dans le billet précédent, il y a de fortes chances pour que Mastodon ne soit pas votre prochain réseau social. Il ne s’agit pas d’un réseau social grand public et par sa structure décentralisée, il induit des problèmes qui font qu’il ne le sera peut-être pas. Cela dit, rien d’impossible, notamment si de grosses sociétés ou des institutions s’en emparent. Pour aller au bout de ma pensée, on voit de plus en plus de grosses boîtes proposer des solutions Nextcloud payantes. On pourrait ainsi imaginer de grosses instances Mastodon gérées par des pros autour desquelles continueraient de graviter des petites instances. L’avenir nous le dira, pour l’heure, un peu de fonctionnement de Mastodon.
Associer son site internet à son profil
Vous pouvez désormais trouver mon compte sur l’instance de l’April : @cyriborne@pouet.chapril.org. Comme on a pu le voir chez Twitter, à l’heure actuelle, la bataille fait rage autour de la certification des comptes. En effet, sans vérification, s’il ne s’agit que de payer, n’importe qui peut usurper l’identité de quelqu’un pour 8$ par mois. On se doute que dans le principe de fonctionnement de Mastodon, il n’est pas question d’avoir de certification et encore moins de certification payante. Toutefois, l’usurpation d’identité reste possible comme partout. Il est ainsi possible de lier son compte à son site internet, voici le résultat attendu.
Comme on peut le voir, j’ai écrit « site » et l’adresse de restez-curieux. Elle apparaît en vert, ce qui veut dire qu’un lien est établi entre le site et mon profil, certifiant qu’il s’agit bien de moi. Dans la modification du profil, c’est ici que ça se passe.
Il va falloir coller le bout de code ci-dessous dans le site et c’est ici que ça devient compliqué.
D’une part, on comprend que la certification de compte, même si ce n’est pas le terme exact, dépend du fait d’avoir un site, d’autre part, elle demande des compétences techniques. Dans le cas de WordPress, je pense que j’y suis arrivé sur un malentendu. En effet, j’utilise les liens sociaux dans mon thème, mais en copiant le code ça n’a pas fonctionné, j’ai pu le faire en glissant le code dans le header.
Seulement, comme on peut le voir, le « mastodon » qui apparaît sous la bannière fait désordre. En retirant le code, la vérification est restée. Une anomalie ou une fonctionnalité ?
Utiliser un client Linux
Il existe quelques clients Linux pour utiliser Mastodon directement depuis le bureau. Il semblerait qu’une bonne partie soit abandonnée. J’ai posé mon choix sur Whalebird qui est à jour. Le client est disponible pour l’ensemble des distributions Linux, Windows et Mac. Son interface est pour le moins propre, en outre la recherche bloque. En ce qui concerne Android, l’offre a l’air d’être plus riche, n’ayant pas encore traîné trop sur le smartphone, je me suis contenté d’installer l’application de base.
Ce qui est positif
On va commencer par ce qui est plutôt positif dans le fonctionnement et dans l’atmosphère de Mastodon. Ce qui suit est à moduler, car j’ai un passif. Il faut comprendre que je suis dans les sphères de Linux et du logiciel libre depuis 20 ans. Comme il a été écrit dans le précédent billet, certains utilisateurs ont fait le choix de ne paraître que sur les réseaux libres. J’ai donc pu retrouver des gens comme Clapico qui a arrêté d’écrire sur le libre depuis plus de 10 ans pour se consacrer à l’activité de son épouse qui vend des savons : l’âne à Nath. Ou encore croiser Philippe Scoffoni qui tient une boîte de prestation de service dans la région lyonnaise : Easya Solutions. J’ai pu discuter avec Lapineige de jeux vidéos. Il y a donc pour ma part une nostalgie, un peu comme si je faisais une réunion avec copains d’avant.
Le fait d’avoir une limite à 500 caractères, le fait d’avoir moins de monde, permet de retrouver l’ambiance des forums d’autrefois. Quand j’écris que j’ai discuté, c’est le cas et cela ne m’est jamais arrivé sur Twitter où finalement cela ne s’y prête pas. La différence de positionnement du réseau social par rapport à l’oiseau bleu, c’est que personne n’est là pour vous vendre quelque chose. Quand la communication sur Twitter est biaisée, car elle a un enjeu, ici, c’est totalement différent.
Moins de monde permet aussi d’avoir davantage d’échanges de qualité et de finalement mieux choisir les personnes avec qui on échange. C’est certainement mon principal reproche dans notre monde actuel et dans les réseaux en particulier, il est impossible de s’intéresser à 10.000 personnes.
Et ce qui l’est beaucoup moins dans le fonctionnement de Mastodon
Comme je l’ai écrit et je le répète encore une fois, Mastodon restera un réseau particulier. À une époque, dans la provocation, j’aurais dit des gauchistes, avec une formulation plus adéquate, on dira des gens qui proposent une vision alternative. On va donc avoir en masse des gens qui ont une sensibilité pour Linux et le logiciel libre. Ils font le choix de ne pas utiliser les réseaux privateurs, les logiciels propriétaires par conviction. J’ai vu quelqu’un employer l’expression « réfugiés de Twitter », quand on sait ce que c’est qu’un réfugié aujourd’hui, bienvenue dans le pays du manque de mesure.
Au pays de l’entre-soi
Alors forcément, l’individu lambda qui pense qu’il va trouver un Twitter bis risque de sentir passer la douloureuse. Moins de monde, des idées différentes, pas d’enjeu, pas de possibilité de briller. Comprenez que lorsque vous passez de Twitter à Mastodon, vous passez dans les grandes lignes d’un réseau de 400 millions d’utilisateurs à un réseau qui n’arrive pas au million. Une goutte d’eau qui en plus a des idées bien arrêtées. Les articles annonçant ainsi une migration avec à peine 70.000 personnes sont donc à côté de la plaque. Pour toutes ces raisons et d’autres, il y aura des déçus qui vont vite avoir la sensation de se retrouver seuls.
Les gens qui construisent leur business model autour des réseaux sociaux n’ont aucun intérêt à venir sur Mastodon puisqu’il n’y a rien à vendre et pas grand-chose à gagner.
La problématique des instances
Je note d’autres problèmes parmi eux celui-ci
Comprenez que je ne suis pas dans une démarche de découverte des profils, je rajoute les gens que je connais déjà. Ici Odysseus. La problématique ici, ce sont les comptes qui ont pu être créés sur différentes instances, on peine à trouver quel est le bon. On comprend mieux avec cette capture le souci de la multiplication des instances inhérente au fonctionnement de
Et cette problématique se poursuit dans le choix de l’instance. Vous avez accès à trois timelines différentes :
- Votre timeline composée par vos messages et par celle des comptes que vous suivez
- La timeline globale où vous avez tout qui tombe et trop rapidement pour suivre
- Enfin votre timeline locale qui correspond aux messages postés sur l’instance.
On comprend alors que celui qui ne connaît personne et qui cherche des comptes dans les messages locaux risque de rapidement déchanter s’il est sur une petite instance.
Visibilité toujours
Ploum soulève le problème dans son billet très réussi sur Mastodon à savoir que le nombre de followers apparaît de façon publique. Ainsi, comme il l’écrit, on va suivre les gens qui sont déjà suivis. Ce souci de visibilité est vieux comme les forums. À une époque, je parle d’il y a plus de 20 ans, c’était le nombre de messages et l’ancienneté qui faisaient la loi. Ainsi certains membres n’hésitaient pas à « flooder » pour faire monter leur nombre de posts sur le principe de celui qui a le plus gros. Depuis dans les forums est apparue la possibilité de supprimer ces critères de manière à mettre tout le monde sur un pied d’égalité. Ainsi, on tient davantage compte de ce que l’individu raconte, de sa pertinence, plutôt que de son nombre de followers.
Je vais avoir du mal à suivre mon compte en salle des profs
Comme vous pouvez le voir et malgré un filtrage des contenus adultes, on se retrouve avec au moins de la nudité. Je n’ai pas vu passer des choses très trash pour l’instant. Il faut savoir qu’à la publication d’un message, vous avez la possibilité de préciser si celui-ci est à caractère choquant ou non. Il s’agit donc pour l’auteur du message, d’une volonté délibérée d’afficher du nu. On touche ainsi du doigt la problématique de la modération, passera, ne passera pas. Il reste possible de bloquer ou de couper le sifflet à des comptes comme dans tout réseau social.
Dernier point et pas des moindres, aux heures de pointes, c’est lent, et ça nous renvoie à la problématique des instances saturées.
Garder son compte Twitter mais pas pour les raisons qu’on pense
Twitter est un réseau social qui va conserver du sens. Mon compte désormais ne me sert que de bot pour balancer les articles du site sur Twitter. J’aurais pu faire le choix de le supprimer, mais je ne le fais pas pour une simple et bonne raison. Twitter reste le seul endroit où vous pouvez vous faire entendre. J’ai fait écho d’une histoire qui m’est arrivée avec Bricodepot, c’est par Twitter que j’avais réussi à faire bouger mon magasin. J’ai eu dernièrement un souci avec DHL, c’est encore par Twitter que j’ai réussi à me faire entendre. Twitter reste malheureusement le seul endroit où les marques ont peur du bad buzz.
J’évoquais la possibilité de retrouver des gens sur Mastodon mais la contrepartie, c’est d’en perdre sur Twitter. Je pense à Seboss666 ou à Adrien de LinuxTricks. Couper son compte, c’est aussi se priver de ces contacts, c’est donc une mauvaise idée.
Pour finaliser le fonctionnement de mon Mastodon, j’ai quand même fait la purge dans mes comptes Twitter de façon à ne pas avoir de redondance. Si certains comptes sont uniques et produisent des contenus propres au réseau, ce n’est pas le cas pour tous où il suffit de récupérer le flux RSS.
J’ai installé l’extension get-rss-feed-url-extension qui me permet de récupérer le flux dans une page quand il existe, ce qui est de moins en moins vrai. Mon instance de FreshRSS reste ma principale source d’infos.
Réfléchir au fonctionnement de Mastodon c’est réfléchir à sa pratique des réseaux
Je n’irai pas jeter la pierre à Twitter et c’est d’ailleurs stupide de le faire. Twitter était violent, Twitter traquait, Twitter envoyait de la publicité, Twitter manquait de modération, Twitter utilisait les méthodes pour vous garder dans son réseau. Twitter n’a pas attendu Musk. Se réveiller un matin et en prendre conscience, c’est digne du mythe de la caverne.
Toutefois, le martèlement de ces dernières semaines quant à la reprise de Twitter par Musk aura fait quand même son petit bout de chemin, pour me faire réfléchir à son utilisation. Utilisation de mes réseaux, de mes usages, que je remets régulièrement en question.
Ainsi,
- Le site qui à l’origine avait une vocation pédagogique pour les plus jeunes s’autorise à aller vers des sujets plus techniques et complexes. En effet, mes jeunes viennent lire des corrections ou des cours mais ne sont intéressés par rien d’autre dans les contenus que nous proposons. Le médium écrit avec des textes montant à plus de 1500 mots c’est une autre époque.
- Twitter me sert donc de bot pour le site, il me permet de communiquer avec certaines personnes et de « gueuler » si nécessaire.
- Instagram reste ma plateforme de lien avec mes jeunes, notamment ceux qui ne sont plus mes élèves. J’essaie actuellement d’y mettre un peu de contenu pédagogique avec des fiches de maths et quelques actus.
- Mastodon me permet de retrouver la population Libriste que j’ai perdue de vue depuis un moment. Sera-t-il pour autant instructif ? Sera-t-il une source d’apprentissage ? Un lien de rencontres ?
À suivre.
Le compte gnous c’est mon compte peertube. Il n’y a donc pas de distinction. 😐
1) L’apparition (ou non) du nombre d follower est configurable.
2) Idem pour les fils: avec un bon client on peut les mettre on/off à volonté
3) il y a une fonctionalité de filtre pour la salle des profs 🙂
@François, le filtre n’a pas fonctionné puisque j’ai coché la case pour les contenus sensibles.
Un billet assez proche dans l’esprit de celui que je n’ai pas encore fait paraître…j’espère amener un plus :s , surtout que ça ne manque pas sur le sujet