Le mot sobriété vient de faire son apparition dans le vocabulaire de tous les politiques. Il n’y a pas si longtemps, c’était l’apanage des écologistes qu’on considérait parfois comme des extrémistes ou des illuminés. Avec la crise en Ukraine, le réchauffement climatique, les différentes pénuries, le mot sobriété n’est plus tabou.
Qu’est-ce que la sobriété ?
Lorsqu’on évoque la sobriété, à l’origine, on a tendance à penser qu’il s’agit d’une personne qui ne boit pas ou plus d’alcool. Par définition, l’une des définitions de la sobriété : qui est marqué par la mesure, la modération. Lorsque la Russie vous apprend qu’elle vous coupe le gaz et le pétrole, que vous n’aurez pas nécessairement une autre source d’approvisionnement, on parle alors de sobriété énergétique. La définition est assez intéressante et je me permets de vous la donner. La sobriété énergétique est la diminution des consommations d’énergie par des changements de modes de vie et des transformations sociales.
C’est ainsi qu’on vous demande de couper le Wifi le soir, de fermer la porte dans les magasins quand la climatisation est allumée, de limiter les éclairages inutiles. En bref, on vous demande d’économiser l’énergie afin d’avoir des réserves pour l’hiver. Peut-on réellement évoquer un véritable changement de mode de vie ou de transformation sociale ? Pour ma part, non. Il s’agit de simples mesures de bon sens qui auraient dû être mises en place depuis des années.
Si on prend le cas des éclairages dans les boutiques la nuit, il s’agit pourtant d’une loi datant de 2013. Comme souvent en France, on se rend compte que la loi existe mais qu’elle n’est pas appliquée.
Pourquoi la sobriété est un concept qui passe mal ?
La réponse est très simple, elle est incompatible avec le mode de vie capitaliste de nos sociétés. Notre société est basée sur la croissance, la consommation, les loisirs. Ce modèle impose de façon obligatoire davantage de ressources et d’énergie que nous n’avons plus. L’un des exemples typiques ce sont les dernières consoles introuvables, la demande est trop importante par rapport à l’offre. L’offre qui ne peut pas suivre, car nous vivons une pénurie de puces.
L’exemple des consoles est pertinent. Si on reprend la définition de la sobriété donnée plus haut, elle impliquerait un changement de mode de vie. Ici, l’évidence, c’est de dire que nous n’avons pas besoin de 4K ou de 8K et qu’il est tout à fait possible de continuer à vivre sans nouvelle génération de console. Nous comprenons ainsi la limite de la sobriété dans un monde capitaliste.
Si nous restons sur la PS4 ou sur la XboX One par exemple, on ne vend plus de nouvelles consoles et peu d’accessoires. En effet, les consommateurs sont déjà équipés. Il resterait donc à vendre des jeux et du service. Le modèle capitaliste fonctionne ainsi sur le renouvellement, renouvellement qui permet aux entreprises de croître. Sans consommation, pas de profit, sans profit, pas de travail, sans travail, pas d’argent, sans argent, pas de consommation. Un cercle infernal totalement incompatible avec cette notion de sobriété.
Des mentalités qui doivent changer.
Nous sommes formatés par les entreprises et la société pour ne pas être sobres, mais pas seulement. Il est très difficile de demander aux concitoyens de faire des efforts quand les politiques et les puissants ne respectent pas l’exemplarité. Le sentiment d’injustice est tellement important que des comptes de réseaux sociaux suivent les déplacements en jet privé des milliardaires. C’est une façon de montrer qu’une pollution très importante existe et que les riches ou les politiques ne font pas les efforts qu’on demande aux populations. Si le problème est bien réel, il ne doit pas pour autant nous dédouaner de nos obligations. Un effort collectif, un changement radical, est impératif pour changer le monde.
Enfin un déni de la réalité. De façon générale, les gens ne réagissent que lorsque les catastrophes se sont produites ou quand il est parfois trop tard. On sait que le lobbying a œuvré pendant des années pour démontrer l’inexistence du réchauffement climatique, mais ce n’est pas une raison. Les individus n’ont certainement pas pris en compte les signes qu’ils commencent à percevoir avec des températures de plus de 40° et des pénuries d’eau.
La sobriété numérique et le manque de volonté des états
Nous avons bien compris que le principe de fonctionnement d’une entreprise n’est pas la philanthropie, mais gagner de l’argent. Tout ce que vous obtiendrez, c’est au mieux du greenwashing, mais en aucun un changement radical de cap pour changer le monde. La préoccupation de la majorité des milliardaires se résume à partir dans l’espace ou se cryogéniser. Il ne s’agit pas de sauver le monde.
Il est du rôle de l’état de faire le régulateur et de donner les directives nécessaires pour le bien de la population. Lorsque nous avons connu la crise COVID, l’état qu’on soit d’accord ou non avec les directives gouvernementales, a joué son rôle en prenant des décisions fermes pour le bien de la population. La situation est pourtant en urgence mais face au poids des entreprises, l’état ne prend pas de décisions, pourtant des solutions existent.
Lutter contre l’obsolescence programmée n’est pas une volonté
À l’heure actuelle, ma tour est un i5 de quatrième génération. Il s’agit ainsi d’un processeur de 2013 qui tourne parfaitement sur la distribution Pop! OS. Ma machine va continuer de fonctionner encore pendant plusieurs années. Cette machine n’est pas compatible avec Windows 11 de la société Microsoft. Microsoft par ce positionnement va créer de l’obsolescence programmée.
L’obsolescence programmée pose des problèmes à plusieurs niveaux :
- Elle impose aux gens de consommer alors que le matériel est encore fonctionnel. C’est une dépense inutile pour les foyers.
- Avec un système d’exploitation qui n’est plus mis à jour, elle crée des problèmes de sécurité.
- Elle pousse les gens à se débarrasser de leur matériel fonctionnel. Ce sont des déchets inutiles en plus dans le système
- Elle pousse à la consommation de matières premières avec l’achat de nouveaux ordinateurs.
Le système Android est similaire avec des machines qui ne sont plus mises à jour dès leur sortie. Le cas du smartphone est plus compliqué à gérer que le marché du PC car les solutions libres ne sont pas assez développées sur ce type d’appareil.
L’état ne prend aucune mesure contraignante pour les fabricants. Les quelques mesures apparues sont des mesurettes comme l’indice de réparabilité.
Le logiciel propriétaire, un logiciel qui ne vous veut pas du bien
Sans entrer dans les détails, on pourra dire que le logiciel propriétaire est fait pour gagner de l’argent quand le logiciel libre est fait pour rendre service à la collectivité. Par le fait, dans une société capitaliste, on ne se pose pas la question de savoir si pour gagner de l’argent, on est éthique, écolo, durable. L’exemple type, c’est Office 365 ou toute la mouvance cloud qu’on peut voir à l’heure actuelle.
Quel intérêt pour le client d’avoir son système délocalisé dans les nuages ? Il est finalement faible. La promesse d’avoir accès à ses documents depuis n’importe quel endroit n’a finalement que très peu de sens. En effet, au mieux, vous avez un ordinateur unique sur lequel vous avez l’intégralité de vos documents et vous réalisez votre sauvegarde. Au pire, vous avez un ordinateur au travail, un ordinateur portable et un fixe à domicile. Est-ce que cela légitime le fait d’avoir votre travail dans les nuages. La seule chose qui a du sens pour l’utilisateur final, c’est d’avoir un logiciel toujours à jour, mais il y a un coût. En effet, vous n’êtes plus propriétaire du logiciel, vous le louez. Cette location sur le long terme vous coûtera bien plus cher qu’un achat.
Ce système de location pose de nombreux problèmes :
- L’absence d’interopérabilité vous emprisonne dans le logiciel. Concrètement, un docx peut être lu par LibreOffice, mais mal. Pour d’autres logiciels, vous ne pouvez plus utiliser votre travail.
- Du fait de ces contraintes, vous êtes dans l’obligation de subir les augmentations de tarif. On a créé une dépendance, il est difficile pour l’utilisateur de quitter le logiciel, alors il paye.
Le logiciel propriétaire est présent dans les entreprises qui font des choix de stratégie. C’est un budget qu’elles assument. Est-il nécessaire de payer des fortunes dans des technologies dans les administrations françaises ?
Imposer le logiciel libre partout où c’est possible
Quel lien entre la sobriété énergétique est le logiciel libre ? Le logiciel propriétaire s’appuie de plus en plus sur la dématérialisation de façon à ce que vous ne soyez plus dans une situation de propriété, mais de location. La dématérialisation est énergivore. J’aime bien ce graphique.
Il s’agit d’un tableau d’équivalence entre le nombre de spectateurs de séries sur Netflix et le nombre de miles, sachant qu’il faut multiplier par 1.6 pour avoir le nombre de km. On pourra me faire remarquer que la consommation des outils Microsoft est moins énergivore que le streaming et c’est vrai. Néanmoins, le modèle de LibreOffice sur un ordinateur d’occasion est certainement imbattable d’un point de vue économique et environnemental. Discutable bien sûr, puisque tout dépend de l’alimentation et des composants.
Sauf filière particulière, il parait évident qu’il est possible d’installer des LibreOffice dans toutes les écoles de France et certainement la majorité des administrations. La circulaire Ayrault de 2012, allait pourtant dans ce sens, à part la gendarmerie, personne n’est passé au libre.
Le passage au libre présenterait pourtant de très nombreux intérêts pour les états.
- Se désengager des sociétés qui visent au renouvellement permanent pour des raisons commerciales.
- Et donc éviter l’obsolescence matérielle
- Maitriser les budgets
- Gagner en souveraineté
- Participer au développement du logiciel libre pour le rendre meilleur.
Alors que la solution paraît évidente, le lobbying est trop important. En effet, si ça ne se fait pas, c’est un manque de volonté flagrant, ça coince quelque part.
yakafokon
Alors que le monde va quand même franchement mal, la sobriété informatique est une des plus faciles à atteindre. Les machines existent, les logiciels existent, les communautés motivées pour former existent. Tant que les intentions ne deviendront pas concrètes, la sobriété ne restera qu’un mot. Lorsqu’il est pourtant simple de basculer l’informatique actuelle sans casser véritablement les habitudes et que nous ne le faisons pas, on imagine que la sobriété énergétique n’est malheureusement pas pour demain.
Les utilisateurs de LinkedIn ont besoin de posts comme celui-ci !
Bref, c’est comme la lumière des magasins la nuit, on a ce qu’il faut mais on ne fait rien appliquer parce que ça dérange le commerce…En attendant, y’a plus qu’à « influencer » nos entourages en montrant ce qu’il est possible de faire