Au programme de ce SF numéro 3 : une bien curieuse lettre du président des États-Unis à son successeur, Yiu ou l’apocalypse, Androïdes, les âmes d’Hélios et Eclipse.
Letter 44, la SF en comics
Le nouveau président des États-Unis est élu. Sur son bureau, une lettre du précédent président. Il lui annonce que les huit dernières années qu’il a passées à la tête de l’état ont eu un seul but : préparer l’invasion extra-terrestre. En effet, dans la ceinture d’Astéroïdes a été localisée une construction qui n’a rien d’humain. Un vaisseau, le Clarke, est parti dans l’espace pour aller voir de quoi il en retourne.
On va suivre ainsi les aventures de l’équipage et leur rencontre avec les aliens. Parallèlement, ce qui se passe sur terre. Car, si le secret a été bien conservé, l’arrivée des aliens est attendue. Les USA ont développé des armes modernes permettant d’inverser le conflit. Ils prennent ainsi dix ans d’avance sur les autres pays. Le nouveau président, un démocrate, décide d’en finir avec les conflits commencés par le précédent président. En effet, les armes sont tellement puissantes qu’il peut en finir avec le conflit très rapidement. Les armes ne passent pas alors inaperçues et les autres pays s’inquiètent. Il y aura de graves répercussions sur la terre.
Je ne suis pas fan de Comics, ni vraiment de manga d’ailleurs. Je trouve que le traitement des émotions est souvent peu réaliste, peu adulte. Letter 44 n’échappe pas à la règle, on nage en plein délire. L’équipage au bout de nombreuses années de promiscuité finit par tisser des liens tellement important qu’un enfant nait. L’ambiance communauté hippie dans l’espace, le président des USA qui donne l’impression d’être une caricature de film américain, je ne suis pas vraiment fan.
Pourtant, Letter 44 a de solides arguments pour accrocher. Un dessin qui fait penser aux super héros. Une histoire surréaliste pétrie de cliffhangers qui fait que l’on a du mal à lâcher les plus de 800 pages de la série.
Yiu
L’action se déroule après 2150, nous sommes à la limite de l’anticipation ou de la dystopie. En effet, le monde va particulièrement mal, la bande dessinée n’est d’ailleurs pas avare à ce propos. On vous raconte dans les premières pages les différentes catastrophes qui se sont produites. Un monde qui meurt, un monde fanatisé.
Yiu est une tueuse. Elle ne tue pas par plaisir, mais pour collecter d’énormes sommes d’argent afin de sauver son jeune frère. Celui-ci comme beaucoup de monde dans ce monde qui décline, a besoin d’un nouveau cœur et de nouveaux poumons. On suit donc les différentes missions de Yiu et son ultime, tuer ce qui s’apparente en gros à LA bête. En effet, une des nombreuses religions développe dans son laboratoire une créature terrible qui pourrait bien détruire l’humanité.
Yiu n’est pas une bande dessinée convaincante. Alors que les nombreux auteurs qui collaborent à la bande dessinée ont pris le soin de poser les bases d’un univers solide, c’est creux. On prend le temps d’expliquer comment on en est arrivé là pour en fin de compte avoir une bande dessinée très graphique. On notera aussi le côté religieux et technologique très exagéré, caricatural, qui fait penser dans les exclamations à une bande dessinée de Jodorowsky. Pour le dessin en outre rien à redire. De grandes scènes de bataille, des doubles planches, du grand art.
C’est avec une grande surprise que Yiu premières missions est largement plus passionnant. C’est très rare dans la bande dessinée. La plupart du temps, les suites ou les préquels n’arrivent pas au niveau de l’original, ici, c’est l’inverse.
Des premières missions bien plus carrées
Yiu la série principale est pesante. La sœur qui cherche impérativement à sauver son frère dans un monde apocalyptique. Pourtant, cette idée où les religions se sont multipliées et ont pris le contrôle est plutôt pertinente. Les premières missions, du fait d’être des one shot ou un diptyque dans l’univers de SF, font que l’on s’enlise moins dans une histoire trop longue. Il en reste ainsi des histoires rapides, efficaces et maîtrisées.
Dans la première mission, on assiste à la naissance de Ji-a, le frère de Yiu. On découvre un fonctionnement de la société, à savoir, la création d’hommes dédiés à la réutilisation des organes. Pour la seconde mission, Yiu doit voler une urne sacrée chez des hommes qui vivent comme au Japon médiéval. Ensuite, une intervention pour sauver son frère pris au piège avec des terroristes.
De façon générale, on a un petit côté Batman. En effet, on se rend compte que les actions des uns et des autres sont le fruit de la société pourrie et folle dans lequel Yiu vit. Ce sera aussi l’occasion de comprendre l’origine de certains personnages qui interviennent dans la série principale.
Androïdes ou les terres d’Arran en SF
Les terres d’Arran sont comme j’aime à le rappeler, un modèle économique intéressant pour la bande dessinée franco-belge. Plusieurs dessinateurs et scénaristes pour un même univers avec un directeur de collection pour donner le tempo. Jusqu’à quatre sorties dans l’année, ce qui évite la lassitude au lecteur toujours plus impatient. Si l’héroïque fantasy a été faite largement, et même les vikings et les sirènes, il n’y avait pas de grande série de ce type en SF. On ne s’étonnera pas que le premier tome d’Androïdes est scénarisé par Jean-Luc Istin à qui l’on doit les terres d’Arran.
Comme on peut s’en douter, il s’agit d’une série qui va tourner autour des robots. La conception graphique comme pour toutes ces séries en jette particulièrement. Le premier tome démarre fort avec un album dans lequel la population humaine devient immortelle, en contrepartie, elle ne peut plus se reproduire. Pour avoir cette immortalité, les gens prennent une mystérieuse pilule bleue. Tout aussi mystérieux cette femme qui tombe enceinte alors que c’est impossible. Difficile de vous dévoiler la suite sans tout dévoiler, mais c’est très réussi.
Pas évident de faire la synthèse de toute la série, quelques exemples. Dans le tome 2 un androïde ramène un enfant devenu vieillard après un voyage de mille ans. Il trouve une terre qui a régressé avec des robots de combats encore actifs. Classique, mais bien écrit. Un robot qui aime un peu trop le sang. Une androïde immortelle qui rêve de mort.
De façon générale, sans dire que l’on est tombé dans Asimov, il y a une forte réflexion sur la robotique et les sentiments. La série est plaisante, les tomes pas toujours égaux dans la qualité des histoires, mais ça passe.
Les âmes d’Hélios
Dans le futur, la cité d’Hélios est répartie en caste. Ylang fait partie des écussons noirs, la caste la plus basse. Sa mère se prostitue pour subvenir à leur besoin. Pour sa fille, sa mère rêve d’autre chose, Ylang sera dragon. Il s’agit de la caste qui domine avec les religieux. En effet, les habitants d’Hélios sont des fanatiques où le moindre comportement considéré comme déviant est passible de la peine de mort.
On va assister sur quatre tomes à l’ascension d’Ylang dans un monde futuriste particulièrement noir. Les âmes d’Hélios est une bande dessinée de SF particulièrement dure avec un final surprenant. On notera le dessin de Ricci, un homme particulièrement sympathique qui écoute les avis de ses lecteurs dans les différents forums de bd.
Eclipse
Eclipse est une bande dessinée en trois tomes dont il n’est pas forcément évident de faire le pitch. Dans un futur très lointain, un homme au lieu de subir la peine de mort se retrouve transféré dans le corps d’un robot. C’est ce qu’a trouvé l’armée pour lutter contre une race extra-terrestre rencontrée sur une planète lointaine. Ce n’est pas sans faire penser à la guerre éternelle dans le traitement d’ailleurs. Il apparaît que cet homme, devenu robot, a été à la tête de la révolte des machines. C’est son histoire qu’il raconte à sa fille à l’aide d’une clé USB mystérieusement donnée par un inconnu.
Sa fille quant à elle est devenue une espèce d’archéologue des civilisations extra-terrestres disparues. Financée par une société privée, elle et son équipage parcourent les mondes à la recherche des civilisations disparues. On suit ainsi, en parallèle, les aventures de la fille et l’histoire du père. On se doute qu’ils finiront par se retrouver.
Un scénario assez surprenant qui nous emmène dans toutes les directions pour une histoire qui tient la route.