Depuis un moment, je m’évertue à classifier les bandes dessinées par thématiques, ce n’est pas toujours évident. On peut toujours dire que telle ou telle bande dessinée rentre dans une boîte, mais parfois la boîte est tellement riche qu’elle devient inclassable.

Ken Games

Ken Games est une bande dessinée en trois tomes, Pierre, Feuille, et Ciseaux qui correspondent au nom des héros. Il s’agit d’un récit basé sur le mensonge, le faux semblant et les apparences. Pierre Fermat, comme le mathématicien, est un étudiant brillant en mathématiques, en principe. Ce dernier s’est tourné vers la boxe dans laquelle il s’épanouit. Il a pour meilleur ami T.J., monsieur feuille. Simple banquier en apparence, il est pourtant un joueur professionnel de poker. Enfin Anne, la compagne de T.J. institutrice avec des tonnes d’histoires sur les enfants, elle répond au nom de tueur professionnel ciseaux.

Ils s’aiment, mais se mentent jusqu’au jour où la vérité va nécessairement éclater. Un tournoi de poker un peu trop important, un grand match de boxe et une tueuse au milieu, les destins s’entrecroisent. Bande dessinée particulièrement bien construite, avec une passion évidente pour les mathématiques à travers les maths bien sûr, mais aussi les cartes ou les échecs, Ken Games est pour ma part inclassable. Boxe, maths, amour, amitié, violence extrême, destin, il est impossible de poser un cadre.

Le dessin est somptueux, parfaitement maîtrisé, l’histoire comme vous l’avez compris nous promène sur les trois tomes. Difficile de savoir dans quoi on s’embarque.

Green Manor ou le meurtre inclassable

Un docteur arrive dans un asile, un patient en camisole de force. Il s’agit de l’ancien domestique du Green Manor. Le Green Manor est un club du XIX° siècle qui attire les nobles de la société anglaise. Très chic, très bon goût, ces messieurs ont pourtant tous une passion pour le crime.

Sur trois tomes, le domestique va raconter au médecin toutes les histoires de crime qu’il a pu entendre. Il s’agit d’une bande dessinée à l’humour très noir composée d’histoires courtes autour des crimes ou de la mort en général. Par exemple ce vieux monsieur qui raconte comment, depuis l’enfance, il est devenu un génie du crime. Ces deux nobles devenus tellement forts à la chasse qu’ils se choisissent comme proie mutuelle dans les rues de Londres. Ou ce meurtre totalement insoluble où l’on finit par penser que c’est un singe qui a commis le crime.

Très drôle, très bien écrit. La structure, le cadre, l’humour trop noir en font une bande dessinée vraiment atypique, inclassable.

Magasin général

Magasin général est une bande dessinée qui se déroule dans les années 40 dans un coin perdu de la province de Québec. Fait atypique, la bande dessinée est réalisée à quatre mains, y compris pour le dessin. Alors que Loisel a quand même marqué la bande dessinée franco-belge avec la quête de l’oiseau du temps, inspiré des dizaines de dessinateurs, il partage le dessin avec Tripp.

La réalisation est ainsi inclassable, l’histoire n’est pas en reste. On va ainsi suivre dans ce village, la vie de nombreux personnages dont Marie, la propriétaire du magasin. Jeune veuve, sans enfant, elle se retrouve du jour au lendemain à la tête de cette boutique, un nouveau défi à relever. Mais pas seulement celui-ci, un autre, vivre pour elle. Elle s’émancipe au fur et à mesure et de sa vie de femme mariée dans l’ombre et du fonctionnement de son mari. Un curé passionné par l’ingénierie qui sympathise avec l’athée du village avec qui il se lance dans la construction d’un bateau.

Magasin général est difficile à capter. Plus une ambiance qu’une véritable histoire, une tranche de vie. Trois tonnes d’anecdotes pour un fil conducteur simple, la vie des gens du village. Il s’agit aussi d’un récit d’époque et la société des années 40 au Québec. Le personnage de Serge homosexuel, ou le jazz, qu’on juge comme la danse du diable, rappellent que les temps ont changé.

Excellente bande dessinée dans laquelle paradoxalement, il ne se passe pas grand-chose et pourtant on est captivé.

Pandora box

On a déjà croisé la boite de Pandore dans le jeu Immortal Fenyx Rising. Pandore, première femme de l’humanité, se voit confier une boîte renfermant tous les maux du monde. Bien évidemment, elle ne doit pas ouvrir la boîte, mais la curiosité fait que bien sûr, elle l’ouvre et répand l’orgueil, la luxure, l’avarice et les autres péchés capitaux sur le monde. La bande dessinée se décompose ainsi en sept tomes portant chacun l’un des péchés mis au goût du jour, parfois avec un peu d’anticipation.

Par exemple, pour l’avarice, Midas. Dans le top dix des plus grandes fortunes a pour fille unique une jeune femme qui travaille pour une structure au Brésil qui finance des petits projets. Elle ne sait pas que c’est son père qui dirige la banque qui prête l’argent. Chaque album reprend plus ou moins un lien avec la mythologie grecque. On se rappelle que Midas à cause du pouvoir de transformer les choses en or, finit par perdre ses enfants en les touchant.

Il n’y a pas de liens entre les albums, sauf entre l’envie et la colère, et entre l’orgueil, le premier tome et le dernier l’espérance. Pandora box est une très bonne bande dessinée, très documentée. J’évoquais plus haut l’avarice, vous avez de nombreuses explications sur le fonctionnement de la monnaie. C’est assez récurrent dans la bd, pour la gourmandise, ce sera autour de la vache folle.