La définition de l’infobésité, c’est d’après Wikipédia :
Un concept désignant l’excès d’informations qu’une personne ne peut traiter ou supporter sans nuire à elle-même ou à son activité.
Wikipédia
Je trouve que cette définition est plus pertinente que celle donnée par le Robert qui se limite à : excès d’information propre à l’ère du numérique. Je pense en effet que la notion de capacité de traitement et de nuisance doivent impérativement apparaître dans la définition. En ce qui concerne le numérique, elle est discutable. Effectivement, si vous regardez BFMTV c’est une participation à l’infobésité, et ce n’est pas nécessairement en lien avec le numérique. Le numérique est un facilitateur, il n’en est pas la cause.
Ma première infobésité
Je pense que j’ai ressenti pour la première fois la notion d’infobésité durant la crise COVID. Il s’agissait d’une situation inédite, à laquelle s’ajoutait un sentiment d’impuissance. Je crois que c’est un des critères qui joue sur moi, le fait de ne pouvoir rien faire, de subir. Nous étions bombardés d’informations sur cette nouvelle maladie. L’intégralité des médias jouant sur les effets d’annonce en donnant à la sortie des informations qui étaient parfois contradictoires ou fausses. On peut penser dès les premières semaines au traitement miracle de l’hydroxychloroquine avec un Didier Raoult propulsé sur le devant de la scène.
J’évoque le cas Raoult non pas pour la polémique, mais pour donner le ressenti de l’époque. Dans tous les journaux, on explique que le problème est réglé, cocorico, c’est un Français qui a trouvé le remède. Sans vérification, on affiche ce traitement miracle. Peu de temps après, on s’interroge sur son efficacité pour finalement le désavouer lui et son sauveur.
Une situation inédite et lourde
Nous sommes à l’époque dans une situation de confinement, nous passons énormément de temps devant nos écrans. Nous devons gérer les événements suivants :
- Une situation en distancielle que nous n’avons jamais connue
- Une situation en distancielle privée et professionnelle. Comprenez qu’il ne s’agissait pas que de gérer son propre distanciel, mais aussi celui de la famille confinée
- Des angoisses et surtout des jeunes. Avec l’isolement nous avons fait office de psy pour des jeunes qui n’allaient pas bien chez eux, qui avaient des questions et nous pas toujours les réponses. On notera que les violences domestiques en cette période ont explosé, preuve que la santé mentale de chacun a été touchée.
- La crise sanitaire avec ces fameuses informations qui nous arrivent en non-stop.
À l’époque, je fais des semaines de 70 h pour répondre aux attentes des élèves et des familles. La situation est totalement nouvelle. Nous réalisons que les élèves ne sont pas du tout à l’aise avec l’outil numérique. Plus que de la pédagogie, nous faisons du support. Nous vivons aussi la situation avec une véritable culpabilité. Beaucoup d’élèves à l’époque décrochent, nous mettons tous les moyens en œuvre pour assurer la continuité pédagogique au détriment de notre santé.
Les réseaux sociaux sont éprouvants, une ambiance de fin du monde. Tout le monde a son opinion sur la question. Le mal-être de chacun explose dans chaque message.
Remédiation
À cette époque, j’ai coupé mes réseaux sociaux. Il s’agissait d’une volonté de repli sur soi, afin de se protéger du bruit permanent. Il apparaissait en effet que l’anxiété de chacun était devenue trop difficile à gérer. Ajoutons à cela le cumul d’informations qui n’étaient pas franchement de l’information ni réellement de la fake news, simplement des propos non vérifiés. Être le premier sur l’actu même si cela veut dire raconter n’importe quoi, ce n’est pas grave tant qu’on est le premier.
Nous sommes typiquement dans le cas de l’infobésité. La masse d’information à traiter en lien avec la COVID, avec le travail, avec nos situations personnelles étaient trop difficiles à gérer intellectuellement. De la même manière, les angoisses des autres pesaient trop pour moi.
Si on réfléchit à cette période et avec le recul que nous avons à dix jours du retrait des masques au moment où j’écris cet article :
- L’investissement dont nous avons fait preuve était de trop. Notre volonté d’aller chercher les décrocheurs n’a servi qu’à accroitre notre épuisement. Il apparaît désormais de façon certaine que ceux qui veulent travailler trouvent les moyens et que ceux qui ne souhaitent rien faire trouvent des raisons.
- Nous ne sommes pas plus avancés sur les origines du virus.
- Nous pouvons nous interroger sur les stratégies passées et futures. Alors qu’on enregistre 50.000 personnes contaminées par jour, nous retirons le masque, l’épidémie est loin d’être terminée.
- Toutes les fausses informations ou plutôt les informations qui à postériori ont été fausses n’ont fait qu’occuper notre temps de cerveau.
La guerre en Ukraine, ma nouvelle infobésité
Durant l’été 2021 j’ai rouvert un compte Twitter. Avec la disparition de l’information gratuite sur internet, avec souvent un traitement de l’information locale de mauvaise qualité, j’ai fait le choix de Twitter. Par exemple, le site de la préfecture de l’Aude n’a pas de page d’information en temps réel. Il est donc nécessaire pour s’informer sur certains événements locaux comme les routes inondées ou les accidents de la route de suivre le compte Twitter ou Facebook du préfet. On notera qu’une institution française qui passe par des sites américains pour informer les concitoyens, on est très loin de la définition de la souveraineté informatique.
Parmi les sites que je suis, le site de l’AFP, l’Agence France Presse. En temps réel, j’apprends que la plus grande centrale nucléaire de l’Ukraine est frappée et qu’un incendie est déclaré. Quinze minutes plus tard, l’incendie est maîtrisé. Quelques heures plus tard on sait qu’il n’y a pas de rejet de radioactivité.
La crise Ukrainienne est une véritable catastrophe. Elle démontre que la paix dans le monde ne veut plus rien dire. Alors que les générations futures doivent relever des défis colossaux comme la survie de notre espèce, lutter contre le réchauffement climatique, nous assistons impuissants à ce drame. Nous sortons plus ou moins de la crise COVID, tout un chacun aspire à retrouver une vie normale pour nous retrouver dans une crise encore plus incertaine.
Allumer une télévision ou lire internet, c’est prendre la troisième guerre mondiale de plein fouet. Je dois avouer que c’est très anxiogène que cela joue sur mon activité. J’ai tendance à regarder les informations en boucle, à me documenter, à regarder des vidéos sur le net, à scruter chaque information.
Est-ce que c’est réellement nécessaire de se faire du mal ?
Oui et non. Oui, il est évident qu’il faut s’informer pour comprendre le monde, les enjeux. On ne peut pas tenir un site qui s’appelle restez-curieux et vivre dans l’ignorance. On ne peut pas fermer les yeux et croire que ça va disparaître parce qu’on tourne la tête. Néanmoins, arrêter de vivre pour se focaliser sur ce qui se passe minute par minute, c’est une perte de temps et au moins pour trois raisons.
Si une bombe nucléaire explose, nous ne sommes plus sur la guerre de 39-45. Aujourd’hui une bombe peut raser un pays. On peut penser que si une guerre nucléaire démarre, c’est la fin de notre espèce, certainement la destruction de la terre. Ceci nous entraîne indéniablement vers la seconde raison. Rester les yeux focalisés sur des événements dont nous n’avons pas le contrôle, tétanisés par la peur, c’est potentiellement rater ce qu’il nous reste à vivre. Il vaut mieux donc privilégier ces moments pour faire autre chose.
Enfin, et comme nous l’avons vu avec la crise COVID, même dans les instants les plus dramatiques, il reste toujours une question d’argent. Oui une centrale nucléaire a eu un problème, oui ça fait peur. Cette peur nous attire indéniablement à regarder les écrans, à consommer des espaces publicitaires, à faire monter l’audimat. Notre peur contribue au système.
Et logiquement pour terminer ce billet, ma remédiation personnelle. Pour limiter l’infobésité, j’ai coupé la consultation de l’AFP. L’information à la minute, c’est trop. C’est trop dur à encaisser, c’est trop difficile à digérer et puis surtout, c’est trop court pour avoir du recul. Je ne consulte plus l’information en continu. J’essaie de limiter mon temps devant les écrans qui de toute façon restent mauvais pour la santé. Je profite des miens et j’essaie d’accepter malheureusement ce qui peut devenir une fatalité.
La crise en Ukraine c’est malheureusement comme la COVID, une situation avec laquelle nous devons vivre.
pour le covid19 , j’ai préféré suivre ce site
https://germain-forestier.info/covid/
et celui-ci https://covidtracker.fr/
pour mieux suivre l’évolution
l’information en continu ( notamment TV ou sites d’informations en continu ) ne permet pas d’avoir du recul,
et ne donne pas le temps necessaire à une meilleure réflexion ou décision personnelle
je n’évoque pas non plus les forums , qui d’une certaine manière montrait déjà les sujets en continu
de mon côté j’ai préféré écouter les infos à la radio , cela est toujours correct et limité dans le temps
Peronnellement, j’évite les comptes Twitter de la presse, la cadence est aussi infernale qu’inutile. En revanche, je jette (trop) souvent un « petit coup d’oeil » sur des sites de presse en ligne. Plus régulièrement ces derniers jours, évidemment. C’est souvent comme cela que commence le FOMO. Se méfier donc !
Une semaine à travailler au jardin m’a fait le plus grand bien. 🙂
J’imagine que la pire chose à faire c’est d’activer ses notifications France Info 😀
Plus sérieusement je suis tout cela avec pas mal d’objectivité aussi, je me documente davantage sur les causes originelles (une guerre froide encore tiède), des intérêts économiques (l’énergie) et beaucoup d’agitations théâtralisées (ça vous rappelle pas le Covid non à peine).
Je lis l’actualité anglaise (BBC) et canadienne (ICI Radio-Canada), un peu FR3 le midi/le soir.. c’est déjà beaucoup je pense mais comme tu l’as dit il se tenir au courant un minimum, sans tomber dans l’excès, mais y penser c’est déjà y être.
Face à l’infobésité tu prônes donc un régime infodétox c’est pas mal, mais il faut le garder pour toujours pour ne pas retomber dans le travers
Le fait d’essayer de se limiter aux flux RSS c’est déjà un bon tri. Je jette un coup d’œil de temps à temps à Google Actu. J’ai honte. 🙂
Oui je me souviens à l’époque tu avais écris un billet sur ton tri ultra sélectif 😉
38 flux avec de plus en plus d’Américains.
Perso, je n’ai aucun réseau social ( je sais, je suis un fou ) et ne consulte que rarement les site de news. Je pars du principe que j’apprendrais toute information importante assez rapidement car tout le monde en parle. Et ca me fait un filtre a bullshit info de première bourre ou ne ressort que l’important et laisse le bruit loin de mes oreilles sensible 😃
Ca fait du vent dans la tête et ca laisse tellement plus de temps pour faire autre chose de plus interressant
Essayez, c’est l’adopter !
Et j’approuve le lacher prise sur la guerre. Même si c’est très inquiétant ( surtout après la lecture du dernier ken follet, pour rien au monde, qui traite du sujet ) je pars aussi du principe que si je dois prendre une bombe nucléaire sur la courge, je n’y peux pas grand chose, donc continuons a vivre et advienne que pourra !
Écrire « La crise Ukrainienne « , c’est déjà biaiser: il ne faut pas avoir peur d’employer le mot « guerre ».
C’est choquant et l’article est nombrilisme
J’ai remplacé le mot conflit par guerre. Pour la partie nombriliste toute expérience partagée est nombriliste. De la même manière synthétiser 1400 mots à un terme pour un commentaire lapidaire c’est médiocre.
Effectivement, mais mettre dans le même article ou une même réflexion, au même niveau, une guerre (ok pour la manipulation des images et/ou des infos) avec le traitement dune épidémie via les médias, les différents réseaux sociaux, le ressenti personnel, pour ma part cela est dérangeant, mais c’est certainement moi, qui ne comprends pas.
Le titre de l’article est noté humeur et infobésité, il laisse donc transpirer quelque chose de personnel. Je n’évoque pas la guerre, je n’évoque pas la pandémie, j’évoque les effets de l’information continue sur les personnes.