Je vous propose quelques bandes dessinées qui tournent autour de Rome et des romains. À l’instar des différents thèmes que j’ai pu présenter, les pirates ou les orcs, l’antiquité reste un terreau fertile pour de solides histoires. Des combats forcément, mais aussi des intrigues, des complots, de la romance et le sens du devoir.

Les boucliers de Mars

L’histoire part du postulat suivant. À Rome on trouve des boucliers en l’honneur du Dieu Mars. Ces boucliers suspendus en évidence symbolisent la protection de la ville. Nécessairement lorsqu’on reçoit des ambassadeurs qu’un des boucliers tombe, on y voit une catastrophe, un mauvais présage. En menant l’enquête, on réalise que la corde coupée d’un des boucliers n’est pas un accident et encore moins ma volonté d’un Dieu. Pendant ce temps-là, le fort de Zeugma à la frontière est attaqué et pris par traitrise avec la complicité de soldats romains. C’est le préfet Charax qui avait la responsabilité du fort, qui va mener l’enquête.

Les boucliers de Mars est une série en trois tomes finie avec un changement d’auteur, Gilles Chaillet étant décédé durant la réalisation. La série est assez plaisante, je pense que son point fort ce sont les personnages peu conventionnels. Par exemple Charax le héros de l’aventure, est un homme d’âge avancé. Véritable roc, maladroit avec les femmes, c’est un soldat pur jus. Il ne symbolise pas le héros conventionnel, comme chaque personnage de la bande dessinée qui possède un caractère un caractère remarquable. On décrit de façon intéressante la société romaine. Les esclaves, les chrétiens persécutés, les relations de pouvoir. L’enquête est intéressante, on se demande qui tire les ficelles de ce complot pour déclarer la guerre.

Si je devais faire un reproche à la série, ce serait pour les dessins des personnages. Les traits ne sont pas assez caractéristiques pour qu’on puisse les identifier sans réfléchir. À certains passages, je n’ai pas reconnu tel ou tel protagoniste, c’est handicapant.

Les ombres du Styx

L’action se déroule en Afrique du Nord dans une colonie romaine. L’histoire s’ouvre sur un meurtre d’enfant. Celui-ci est comme les autres, fils de patricien, embaumé selon les rites égyptiens. L’enfant a été abusé avant d’être tué. Comme de grandes familles romaines sont impliquées, on dépêche un inspecteur. Isabelle Dethan propose un concept intéressant, celui d’une enquête sur un tueur en série de l’antiquité. Les mécaniques utilisées sont donc connues et classiques sur les trois tomes. Cela fonctionne très bien, avec son lot de surprises et de cliffhangers en fin de chaque tome.

Du fait que les enfants sont embaumés selon les rites égyptiens, les patriciens veulent se faire vengeance eux-mêmes en détruisant les temples. Comme je l’ai écrit plus haut, nous sommes bien dans des mécaniques classiques, imaginer que le coupable fait partie d’une minorité, on connaît. Le dessin d’Isabelle Dethan est toujours agréable, épuré, clair. Même si elle ne révolutionne pas le style, vous trouverez le coupable dès le second tome, j’ai beaucoup apprécié cette série.

Les aigles de Rome

Les aigles de Rome est une série de Marini, un dessinateur bien connu pour le Scorpion. Il fait partie de façon évidente des grands dessinateurs de la bande dessinée franco-belge avec un trait facilement reconnaissable. Avec cette série, il s’attaque au scénario, et il faut le reconnaître c’est souvent compliqué. Il est en effet assez rare de trouver un artiste qui conjugue avec brio les deux compétences. Qu’en est-il pour les aigles de Rome ?

Des « invités » de marque

L’histoire se situe dans un contexte bien précis, celui des princes ennemis éduqués en tant que Romains. Il ne s’agit ni plus ni moins d’otages, une façon de garantir la fidélité des peuples vaincus par l’empire Romain. Marcus Valerius Falco est le fils d’un ancien légionnaire qui a remporté de nombreuses victoires. Le père a dû épouser une princesse gauloise, une obligation mais aussi une récompense. Le mariage dans la bande dessinée revient régulièrement, on y voit de manière systématique une obligation stratégique. Alors qu’il coule une retraite heureuse, on lui demande d’accueillir Ermanamer qui va prendre le nom d’Arminius. Ce dernier est le fils d’une peuplade Allemande qui doit recevoir l’éducation romaine.

Une bande dessinée qui tomberait dans la facilité

Les deux adolescents vont passer l’intégralité du premier tome à se battre. En effet, les deux garçons ont de très forts caractères, insubordonnés, belliqueux, de véritables barbares. Comme on peut s’en douter, c’est à force de brimades communes qu’ils vont devenir amis. En grandissant, on va suivre leurs victoires, mais aussi leurs amours. De ce côté-là, le moins qu’on puisse dire c’est que Marini est allé à bonne école avec un cocktail d’action, de sexualité et d’aventure, comme pour le Scorpion. Profitant d’un trait magnifique, il en fait des caisses, les scènes de sexe et les filles dénudées reviennent de façon très régulière, certainement trop.

La trame, c’est bien sûr le lien fort qui lie les deux hommes mais aussi le fait qu’Arminius ne se serait jamais soumis à Rome. Il serait en effet l’élu de son peuple pour réunifier toutes les tribus germaniques. On se doute qu’avec Falco qui veut tout faire pour honorer son père et Rome, la confrontation sera inévitable.

Un pari réussi qui doit toutefois confirmer

Difficile de ne pas être séduit par cette bande dessinée où tous les éléments sont réunis pour faire un succès. C’est le cas d’ailleurs. Néanmoins, comme je l’ai écrit plus haut, je trouve que l’auteur se laisse aller à une facilité qui ne lui demande pas trop d’effort. Comprenez que la bande dessinée est bien meilleure pour son dessin que pour son histoire. Un point précis me dérange, c’est le vocabulaire moderne employé qui jouxte le vocabulaire Romain de l’époque et l’attachement à l’histoire. On a donc des expressions particulièrement vulgaires qui ne sont pas nécessaires et qui ne cadrent pas vraiment avec le reste de la bande dessinée comme un anachronisme. Volonté, maladresse ou une autre façon d’être populaire ? Au moment où j’écris ces lignes, cela fait dix ans que nous attendons la sortie du tome 6.

Murena

Murena est une bande dessinée démarrée il y a quasiment 25 ans, elle compte aujourd’hui 11 tomes. La série est prévue pour 16 tomes, soit 4 cycles de 4 tomes. S’il fallait faire une synthèse de cette bande dessinée très riche, je dirais que c’est l’ascension de Néron. On est loin ici des champs de bataille, tout n’est qu’intrigue, passion, complot et assassinat.

Le premier cycle, c’est l’ascension de Néron sur le trône. Agrippine sa mère ne rêve que du pouvoir, elle voit en son fils une façon d’y arriver. Seconde épouse de l’empereur Claude, elle réussit à faire adopter son fils. Pourtant, Claude finit par se rapprocher de Britannicus, son fils naturel qu’il a eu d’un premier mariage. Agrippine intrigue et empoisonne pour faire de son fils le nouvel empereur plus rapidement que prévu.

Parmi tous les personnages historiques qui ont réellement existé, des personnages fictifs, dont Lucius Murena. Franc, désintéressé, Lucius Murena va devenir un ami fidèle de Néron. Il est le fils d’une des maîtresses de Claude. Agrippine va faire exécuter celle-ci car elle voit en cette femme une menace. Murena cherchera à trouver les coupables. Dans sa quête, il se fera aider par un ancien gladiateur du nom de Balba. Faute de grandes manœuvres militaires, les combats dans les arènes sont très présents dans la série comme les jeux du cirque.

Le second cycle s’articule autour de Poppée qui prend en quelque sorte la place de la mère de Néron dans le jeu des manipulations et des intrigues. C’est la dégringolade pour Murena qui rentre en résistance contre Néron, on assistera à l’incendie de la ville. Le troisième cycle, c’est le retour de Murena à la cour et la persécution des chrétiens.

Murena est une excellente série saluée notamment par les historiens. La série est documentée de façon systématique à la fin de chaque album avec les références historiques. Elle prend bien sûr de très nombreuses libertés avec l’histoire, mais s’attache tout de même à un contexte solide. Je trouve tout de même que la série finit par s’essouffler avec certaines parties de l’histoire dispensables.

Gloria Victis

Nous n’avions pas fait les courses de char, c’est le cas avec Gloria Victis. L’histoire démarre en Espagne, un enfant voit son père mourir durant une course. Ruiné, orphelin, il finit esclave. Par le fruit du hasard il va sauver une patricienne dont le cheval s’est emballé. La maîtrise du cheval séduit son époux qui l’affranchit et lui donne la gestion de ses chevaux. Alors qu’Aelio s’était juré de ne pas suivre les traces de son père, il va à son tour embrasser la carrière d’aurige.

Bande dessinée en quatre tomes particulièrement réussie, avec une ambiance formule 1. La rivalité des hommes, les destins brisés, un dessin haut en couleur. Le véritable regret de cette bd c’est l’épilogue. Même si on a une fin, on sent une volonté délibérée d’en finir. Il aurait fallu un cinquième tome pour finir correctement, on suppose que c’est la dure loi de l’édition qui est passée par là. On notera un passage par Narbonne, c’est dire l’importance de la ville à l’époque Romaine.

L’expédition

En Égypte un homme est retrouvé sur une barque, mort. Pour son dernier voyage, il est accompagné de très nombreux objets précieux qui intriguent les généraux romains. On pourrait penser qu’il est nubien mais ce n’est pas le cas, c’est une peuplade inconnue. Le préfet demande à l’un de ses plus fidèles soldats de monter une expédition dans le cœur de l’Afrique noire afin de trouver ce royaume et s’emparer de ses richesses. À l’heure actuelle la bande dessinée se compose de trois tomes, le tome quatre sera l’épilogue de la série. Cette bande dessinée se démarque largement des autres séries que je propose ici. En effet, le contexte avec l’Afrique, les animaux sauvages, les rites, mais aussi les personnages. Marcus le héros principal, un soldat fidèle à Rome, s’entoure pour mener son expédition de légionnaires corrompus, un côté sept mercenaires.

À la lecture de la bande dessinée, dans le positionnement des personnages, on a souvent la sensation de voir un film sur le Vietnam, comme apocalypse now. Original pour la situation, des romains en Afrique noire, l’ensemble reste assez classique. J’attends toutefois le dénouement pour savoir si je serais surpris ou non.

Bonus

Les bandes dessinées sur Rome sont légion (humour !), j’aurais pu citer par exemple Cassio. La bande dessinée ne rentre pas pleinement dans la thématique. Il s’agit en effet d’une histoire se déroulant à la fois dans la Rome antique mais aussi de nos jours. Une bonne dose de fantastique pour un personnage qui survit à ses assassins et qui ne vieillit pas. Bien évidemment, les classiques comme Alix, mais force est de reconnaître que j’ai du mal avec la « vieille » bande dessinée. Alix date de 1948 et je n’ai pas réussi à rentrer dans la reprise de la série.

Au cinéma les films sont nombreux, Gladiator pour n’en citer qu’un. Si vous voulez une excellente série télé : Rome. En 2005 la série en deux saisons a certainement été l’initiatrice des codes d’aujourd’hui. Violence, sexualité, mort de personnages importants et un budget digne du cinéma.

Les arènes de Nîmes font partie des monuments très connus en France. L’amphithéâtre dans lequel se sont affrontés les gladiateurs est devenu aujourd’hui un lieu de spectacle et accueille des corridas. La ville de Nîmes a mis au point une visite virtuelle du monument avec des explications historiques sur le monument.

Cliquez-ici pour faire la visite.

4 Comments

  1. Je vais commencer avec les trois tomes des Ombres du Styx, merci Cyrille pour ce point très complet dédié à Rome et la BD.

Comments are closed.