Prohibition, alcool « maison » & crise sanitaire…

Aux États-Unis la prohibition au début du XXe siècle, va favoriser la fabrication d’alcool « maison » et provoquer l’une des pires crise sanitaire du pays…

Le puritanisme impose la prohibition

Dès la fin du XIXe siècle naissent aux États-Unis plusieurs mouvements puritains luttant contre la consommation d’alcool et demandant la fermeture des saloons. Le Maine fut le premier État à interdire la consommation d’alcool en 1851. Ces lobbys deviennent de plus en plus puissants et commencent à avoir l’attention des hommes politiques. En 1855 treize autres États suivront. On les appelle les « Dry States » (États secs).

La prohibition aux Etats Unis est appliquée à partir de janvier 1920 dans 36 Etats. Le 18e amendement dit :  « La production, la vente ou le transport de boissons alcoolisées sont interdits. L’importation vers les États-Unis ou l’exportation en provenance des États-Unis et de tous les territoires sous leur juridiction à des fins de consommation sont également interdites ».

De l’alcool fait maison…

Cela n’empêche pas les Américains de vouloir consommer de l’alcool. Certains vont le produire eux même de façon artisanale. Comment faire ? Simple : Laissez fermenter du maïs et de l’orge dans votre baignoire… Dès 1923 circule une boisson interdite appelée « bathtub gin » (Gin de baignoire) qui rencontre un vif succès !

Chaque région du pays va avoir ses propres productions. En vrac : « bourbonbavard » (caramel et teinture d’iode) à Chicago, « whisky de panthère » à Washington, « ligne blanche » au Kansas, etc.

Mais bien sûr la majorité de l’alcool consommé provient d’ateliers de fabrications clandestins ou de la contrebande en provenance du Canada aux mains, bien entendu, des mafias. Ces mafias fabriquent leur alcool à partir d’alcool industriel utilisé en pharmacie, l’éthanol et rendu inutilisable par l’ajout de produits chimiques par les autorités. Il faut donc que les chimistes mafieux fassent disparaitre ces éléments afin de pouvoir l’utiliser. Malgré tous leurs efforts l’alcool produit avait mauvais goût. Ces boissons étaient baptisées « blind pigs » ( cochons aveugles). Pour faire passer le goût ils devaient mélanger leurs « boissons » avec des jus de fruits.

Très souvent l’utilisation de produits dangereux pour fabriquer alcool entraine des scandales sanitaire: cécité, crise d’épilepsie, démence ou mort…

« Ginger Jake » VS prohibition

La pire crise sanitaire provoquée par de l’alcool « fait maison » se déroule en 1930. De nombreux hôpitaux voient débarquer des malades qui ont des diarrhées, qui ont froid, qui toussent énormément et même certains sont paralysés des jambes ! Les docteurs font vite le rapprochement : Tous avaient consommé du « Jamaica Ginger » (appelé aussi « Ginger Jake »).

C’était une boisson médicinale, prescrite habituellement pour soigner le choléra, la dyspepsie et les nausées…oui oui, vous avez bien lu. Un vrai remède miracle ! Elle était fabriquée avec du gingembre et de l’alcool à 90% ! Il fallait donc la consommer à petite dose.

Mais les plus pauvres, qui ne pouvaient pas acheter de l’alcool de contrebande, se sont tournés vers ce médicament.

L’une des plus importante crise sanitaire !

Seulement ce « médicament » fera probablement 50 000 victimes ! Les fédéraux ouvrent une enquête et découvrent que deux hommes sont à l’origine de cette crise sanitaire. Harry Gross et Max Reisman originaires de Boston. Par soucis d’économie ceux ci remplacèrent le gingembre par du phosphate de tri-ortho-crésyle.

Pour être plus clair: ils ont utilisé du solvant. Et comme l’alcool était interdit, il n’y avait plus de contrôles sanitaires sur ces boissons. Le pire dans cette affaire, c’est que les responsables lors de leur procès en 1933, ne prirent pas plus de deux ans de prisons. Les victimes attaquèrent alors l’État, pour manque de contrôle, mais l’affaire fut classée sans suite. Les victimes n’avaient pas respecté la loi. Elles sont donc responsables de ce qui leur est arrivé…

Voilà comment une loi qui voulait améliorer la santé des américains, a été à l’origine d’un des plus gros scandales sanitaires du pays…

Sources: Historia, Le bulletin d’Histoire des poisons, Wiki, Géo. Une bande dessinée dans le cadre de la prohibition, blue note.

8 Comments

    1. Pas mal comme anecdote ^^
      Mais perso, une prohibition qui autorise les alcools de moins de 20° ça laisse encore pas mal de choix (pour un français) !

      1. oui, mais quand tu fais un EVG, boire du Porto (le seul à 19°C), c’est rude 😀
        bon on s’en est sorti quand même.
        par contre les tchèques étaient vraiment au fond du trou.

  1. Je pense qu’il ne doit pas être bien compliqué de se fabriquer un petit alambique maison pour ses besoins personnels mais est-ce autorisé en France ?
    A pluche.

    1. Distiller soi même n’est pas autorisé. Par contre tu peux faire de l’alcool de moins de 20° sans problème.
      Les droit de distiller se passaient de génération en génération. Dans ma famille la dernière autorisée c’était ma grand mère. Et encore elle ne le faisait pas soi même, mais allait récupérer de l’alcool (90°) à la coopérative.

  2. Bonjour

    Ilnme semble qu’il est toujours possible de faire appel à un bouilleur de cru professionnel pour distiller son propre alcool, moyennant le payement d’une taxe (relativement élevée) en plus du coût de la prestation.

    Le « privilège  » de distiller exonérait simplement de cette taxe.

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