C’est quoi l’ubérisation ?
On trouve comme définition de l’ubérisation :
L’ubérisation est un processus économique qui, grâce aux nouvelles technologies numériques, contourne les secteurs classiques de l’économie en créant un nouvel intermédiaire. Cet intermédiaire qui permet de mettre en relation directe les utilisateurs et les prestataires se matérialise sous la forme d’une plateforme numérique.
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Plus concrètement. L’ubérisation vient du nom de la société Uber. Cette société permet à des individus de faire des courses de taxi en passant par l’intermédiaire d’une plateforme numérique.
L’exemple Airbnb
On retrouve ce principe chez Airbnb. La société met en relation des gens qui veulent louer une maison avec des individus qui sont en recherche. Le succès est forcément au rendez-vous. Les ubers remplissent la fonction de taxi sans pour autant avoir les mêmes charges que les chauffeurs de taxi. Ces derniers doivent notamment payer des patentes. Devenir chauffeur uber c’est moins compliqué que devenir taxi. Par le fait le prix des courses est largement moins cher. Idem pour Airbnb. L’hôte remplit la charge d’un hôtel sans les charges, sans le personnel. La location est à son tour beaucoup moins chère que dans un hôtel. Le système sur le papier est idéal. Des individus peuvent arrondir leurs fins de mois, d’autres peuvent trouver des services moins chers.
Un monde merveilleux pas pour tous
Dans les faits, c’est tout sauf un monde idéal. Par exemple, dans la société Uber où les individus ne sont pas des salariés d’une société. Ils n’ont donc aucune protection sociale et doivent souvent se déclarer en tant qu’autoentrepreneur. De la même manière, l’hôtellerie reste un métier, prendre un Airbnb n’est pas prendre une chambre d’hôtel. Les problèmes engendrés par cette économie sont très nombreux. Ils mettent en péril des secteurs professionnels tout en précarisant les individus qui en vivent. Alors pourquoi un tel succès ? Le prix bien sûr, mais aussi la note.
Une note pour tous les diriger
L’exemple typique c’est certainement blablacar. Il y a 40 ans, on prenait des gens en stop, c’était un service qu’on rendait, qui paraissait normal. Avec un monde devenu de plus en plus violent, la méfiance s’est légitimement installée. Prendre quelqu’un en stop aujourd’hui c’est aller au-devant des problèmes. Blablacar a réussi à transformer une pratique basée sur la solidarité, l’entraide en business. Tout simplement parce qu’il s’agit d’un intermédiaire rassurant, car les gens notent, les gens commentent. Ainsi, pour la personne qui prend un participant de blablacar, il y a non seulement l’intérêt du partage des frais mais aussi savoir qui on prend en voiture. Un profil cinq étoiles sera forcément un profil rassurant. La réciproque est vraie, quelqu’un qui monte dans la voiture de quelqu’un sera rassuré de savoir que le conducteur est prudent.
Des notes partout, pour tout le monde. L’ubérisation en marche
Grâce à la note instaurée par les plateformes, on pose une forme de garantie de qualité, de sécurité. On ne s’étonnera pas alors que sur les marketplaces, on propose à des personnes qui posent un mauvais avis des compensations matérielles. La note est d’ailleurs devenue un argument, une menace, une crainte, si vous ne me faites pas une ristourne, si vous ne me rendez pas un service supplémentaire alors j’irais mettre une mauvaise note.
La suppression des notes à l’école est un sujet qui revient de façon très régulière, la note est considérée comme stigmatisante, démotivante pour les élèves. Un élève qui prend 4 va se décourager, pourquoi pas. Et pourtant à y réfléchir, tout est noté dans le monde des adultes. La note évoquée plus haut mais aussi la note que va donner un chef à ses salariés ou même la note que donne l’inspecteur à des enseignants.
Les temps changent
Ce que je constate pour ma part ce n’est pas tant le problème de mettre une note, mais l’intérêt que portent les élèves aux notes qui a franchement évolué. Vous pouvez aujourd’hui mettre de très mauvaises notes aux élèves, ils s’en moquent. On pourrait trouver de nombreuses explications je préfère en conserver une : le sens. Si sur Airbnb vous avez une mauvaise note, le sens, l’intérêt, est direct. Vous ne louerez pas votre appartement ou on refusera de vous le louer. À l’époque, la note avait du sens pour les élèves. Souvent elle s’accompagnait de privation, de punition mais on avait aussi conscience qu’on avait besoin de bonnes notes pour « réussir ». L’envie aussi de faire plaisir aux parents, aux enseignants. Je prends des pincettes sur le mot réussir. Réussir à l’école n’est pas forcément synonyme de réussir sa vie. Il faudrait de très longs articles pour aller plus loin. La note reste toutefois l’élément clé du passage en classe supérieure, dans une école, qui, comme notre société est basée sur la sélection.
Et pourtant le système de la note est mauvais à commencer par l’ubérisation. Pourquoi ? J’évoquais plus haut blablacar comme j’aurais pu évoquer le boncoin. À une époque, vous passiez votre petite annonce dans le journal, les gens honoraient les rendez-vous, étaient respectueux. Avant, on pouvait prendre des auto-stoppeurs sans avoir peur de se faire découper à la hache. Avant encore, on n’avait pas besoin de mettre de notes à des commerçants car ils faisaient sérieusement leur travail.
La note dans l’ubérisation et la note scolaire ne sont pas les mêmes
C’est ici qu’on comprend que la note d’école et la note d’Uber n’est pas la même. La note d’école doit sur le principe départager les candidats. C’est ici qu’elle est mauvaise car elle n’est basée que sur des critères comme les mathématiques ou le français. Des performances qui peuvent d’ailleurs être biaisées. Les capacités artistiques par exemple sont totalement négligées. L’école doit malheureusement brasser des millions d’élèves et aucun système n’a été trouvé pour que chacun puisse s’épanouir. La note d’Uber est catastrophique car elle est la représentation d’une société qui se dégrade. Une société où l’on a tellement plus confiance les uns envers les autres qu’on a besoin d’entreprises pour nous mettre en relation.
On se plaint de l’ubérisation, de ces entreprises et pourtant elles répondent simplement à un besoin que nos comportements ont engendré. Si tout un chacun était sérieux, honnête, ces entreprises n’auraient pas de raison d’exister, tout comme la notation.
Sachant que ça n’ira pas vers un mieux, il faut prendre l’habitude d’être noté sur tout et ce depuis le plus jeune âge. Noté par son patron, noté sur vinted, noté sur blablacar mais aussi sur Tinder. On pourrait faire le parallèle avec les like qui sont aussi des notes, mais ça, c’est une autre histoire.
Salut Cyrille,
Une bonne rentrée, toujours un plaisir de te lire.
@ndre
et un article qui mérite une bonne note sur des critères qui me sont propres…Car il y a français et francais.
Cet été, un restaurant, bien sympa : le personnel nous a demandé explicitement de noter sur Google, TripAdvisor, Facebook, etc.