Scarlett Johansson au pays de la Covid
Scarlett Johansson est depuis un moment un des personnages de Marvel, Black Widow. Marvel comme la licence Starwars a été rachetée par Disney. C’est dire à quel point l’empire Disney est devenu important culturellement. Avec la crise Covid, une crise mondiale, les salles de cinéma ouvrent, ferment, ont des jauges. Une sortie en salle c’est une prise de risque importante quant à la rentabilité d’un film. Encore plus lorsqu’il s’agit d’un film à très gros budget. Disney pour limiter la casse a par exemple sorti Raya et le dernier dragon, directement sur sa chaîne Disney+.
Scarlett Johansson n’est pas contente
Afin de maximiser la rentabilité pour Black Widow, le film est sorti au cinéma de façon mondiale. Toutefois aux États-Unis, le film est sorti au cinéma mais aussi en VOD pour 29.99 $. C’est excessivement cher, et c’est ici que ça bloque.
Il faut savoir qu’un acteur comme Louis de Funès n’a pas légué d’héritage. Pourtant ses films ont fait partie des plus grands succès de l’histoire du cinéma français. En fait, Louis de Funès se faisait payer au cachet et pas au pourcentage des entrées sur le film. C’est pour cette raison que Scarlett Johansson attaque Disney. L’actrice touche un pourcentage sur les entrées. En outre elle ne touche pas de pourcentage sur les recettes générées par la diffusion sur Disney+. Elle explique que les personnes qui ont vu le film sur Disney+ auraient dû le voir au cinéma. Si la sortie n’avait été faite qu’au cinéma, elle aurait gagné davantage d’argent, elle est lésée.
La crise Covid, le catalyseur de nos changements d’habitude
La crise Covid dans le septième art a joué le rôle de catalyseur avec des effets de bord assez importants.
- Les gens changent leur mode de consommation en étant confinés. Ils compensent les sorties cinéma par des abonnements Netflix, Disney+ ou d’autres services de VOD. Le nombre d’abonnés explose. De plus en plus de réalisateurs connus, d’acteurs célèbres participent sans honte à des productions Netflix. Inimaginable il y a quelque temps. Faire quelque chose pour Netflix c’était pire que pour la télé.
- La réflexion quant à la pertinence des salles de cinéma peut alors se poser. Des multiplexes énormes, des salariés à payer, des salles à chauffer. Dans un contexte où l’écologie intervient dans le débat public, il est légitime de s’interroger quant à ces espaces. Un bon prétexte pour licencier et faire des économies.
- Faire un film pour le cinéma et faire un film pour un format télévision c’est différent. Même si la télévision est très grande, la qualité pour le cinéma n’a rien à voir. Lorsque l’on paye sa place de cinéma c’est pour plusieurs raisons. On veut en prendre plein les yeux. Une sortie peut se finir ou commencer par un restaurant ou un bar. Dès lors, on constate une forte augmentation de la production pour la « télévision », moins pour le cinéma. J’ai la forte sensation que cette augmentation de production, se fait au détriment de la qualité des productions. J’ai l’impression de ne pas avoir vu un bon film depuis un bon moment.
- Le statut de star comme c’est le cas pour Scarlett Johansson est menacé. Désormais ce qui compte, c’est la quantité. On n’attend plus l’événement de la sortie au grand écran. On n’a plus l’attente de retrouver l’acteur culte qu’on adule depuis des années.
Le cinéma physiquement menacé
On pense à juste titre qu’avec la crise Covid, le cinéma est en danger. On pense que c’est le lieu physique qui est menacé sans se rendre compte que c’est bien le médium. La victoire étant pour le petit écran. Pendant des années, on a expliqué que la télévision allait tuer le cinéma. Cela ne s’est jamais produit car autour du cinéma, c’est un événement, une sortie, une rencontre entre plusieurs individus. La Covid a changé nos habitudes. À la faveur économique des réalisateurs, producteurs, elle pourrait bien avoir la peau des salles obscures.
Je note toutefois et c’est un aspect que je souligne ici au travers de la notion d’événement. Un événement c’est quelque chose d’exceptionnel. C’est quelque chose de rare et c’est quelque chose qui doit être attendu. Cette attente qu’on a tuée dans notre société de l’instantanéité. Lorsqu’on est capable de créer l’attente, l’envie, les gens sont encore capables de se déplacer au cinéma. Le film Kaamelott le prouve. Au moment où j’écris ces lignes, plus d’un million de spectateurs se sont déplacés malgré le contexte sanitaire particulièrement complexe.
Et si finalement le secret de la reconquête des salles obscures, c’était de produire moins mais mieux. Une question qu’on peut se poser dans de très nombreux domaines comme l’alimentation. Privilégier la qualité à la quantité.